Mairie de Triel Sur Seine
A l’attention de Monsieur le Maire et Mesdames
et Messieurs les Conseillers Municipaux
Objet : Compteurs communicants Linky – actions à entreprendre
Recommandé R+AR
Triel, le 24 février 2017
Monsieur le Maire,
Mesdames, Messieurs les Conseillers Municipaux,
Notre association Triel Environnement se permet de vous solliciter concernant les compteurs communicants Linky devant être installés sur la Commune.
Comme vous le savez, ces compteurs permettent de collecter de nouvelles données de consommation.
Ils enregistrent ainsi des données permettant de déterminer l’heure de lever, de coucher, la présence ou l’absence de personnes dans le logement, le nombre de personnes présentes, la consommation d’eau chaude, etc.
Autant de données qui traduisent l’intimité de la vie privée et peuvent être exploitées à toutes autres fins que le service de distribution ou de fourniture d’électricité dans le cadre duquel elles sont collectées.
Or l’article R. 341-5 du code de l’énergie accorde aux personnes la libre disposition de leurs données personnelles. Cependant, ce droit apparaît artificiel lorsque les personnes ne sont pas mises en position de l’exercer, comme c’est le cas en l’espèce puisque, d’une part, elles sont privées de toute possibilité de refuser l’installation des compteurs (I.) et que, d’autre part, le fonctionnement de ces compteurs n’est pas suffisamment protecteur (II.).
I. En effet, le déploiement de ces compteurs communicants a été décidé sans consultation préalable du public et il s’opère aujourd’hui, à marche forcée, sans que le consentement des personnes ne soit ni recueilli, ni même sollicité.
La société Enedis, en charge de ce déploiement, indique en effet très clairement aux personnes qu’elles n’ont pas leur mot à dire sur le remplacement des compteurs, lesquels n’appartiennent pas aux particuliers.
S’il est vrai que les compteurs électriques n’appartiennent pas aux personnes, ils n’appartiennent pas non plus à Enedis.
Ils sont en revanche la propriété des autorités concédantes, en application de l’article L. 322-4 du code de l’énergie, au nombre desquelles figurent les Communes.
Aussi, en tant que propriétaire, il vous revient de préserver les biens du domaine public de la Commune et seul le Conseil municipal peut se prononcer sur la désaffectation et le déclassement des compteurs existants. Au contraire, il apparaît que la Commune n’a pas été consultée sur cette élimination des compteurs existants. Une telle consultation lui aurait permis de prévoir qu’elle ne serait possible que si les personnes concernées y consentent.
Dans ce contexte, nous vous enjoignons de prendre une délibération interdisant l’élimination des compteurs existants, notamment pour les personnes qui n’y seraient pas favorables.
Il peut, en effet, être souligné que les compteurs existants fonctionnent parfaitement et remplissent, d’ores et déjà, les exigences européennes relatives à l’information des consommateurs sur leur consommation et à la faculté pour les fournisseurs de proposer des tarifs différenciés selon le profil de consommation de leurs abonnés.
En outre, ces compteurs, par les champs électromagnétiques qu’ils génèrent, ont des effets directs et significatifs sur l’environnement, en ce qu’ils imposent de nouveaux champs au brouillard électromagnétique dans lequel nous évoluons.
Or, les décisions réglementaires qui ont de tels effets sur l’environnement doivent, en vertu de l’article L. 123-19-1 du code de l’environnement, être précédées d’une procédure de consultation du public et les dispositions réglementaires prévoyant le déploiement de ces compteurs, à savoir les articles R. 341-4 et R. 341-8 du code de l’énergie, n’ont pas été précédées d’une telle procédure.
Il en résulte que la décision de déployer ces compteurs communicants (R. 341-4 du code de l’énergie) et celle fixant le calendrier de ce déploiement (R. 341-8 du code de l’énergie) ont été prises au terme d’une procédure irrégulière, ce dont qui doit vous faire conclure à leur illégalité.
Il ne peut donc pas être valablement soutenu qu’il existerait une obligation légale de déployer ces compteurs, et ce d’autant moins que leur fonctionnement ne permet pas de garantir suffisamment le droit des personnes.
II. Ces compteurs communicants présentent des enjeux forts en termes de protection des données personnelles, sur lesquels la CNIL s’est plusieurs fois prononcée.
Or, il apparaît que le déploiement des compteurs n’a pas été conduit jusqu’à présent en respectant strictement les exigences énoncées par la CNIL.
A titre d’exemples, l’enregistrement de la courbe de charge dans le compteur retient, par défaut, un pas de temps demi-horaire, alors que la CNIL a exigé, dans sa délibération du 12 novembre 2012 explicitée sur ce point le 15 novembre 2015, que le pas de temps soit tout au plus horaire, et ce lorsque l’usager ne s’est pas opposé à cet enregistrement.
De même, le consentement des usagers pour la transmission de leur courbe de charge à des tiers n’est pas recueilli par le gestionnaire du réseau, contrairement à la recommandation de la CNIL du 12 novembre 2012. Celui-ci ne peut donc pas contrôler a priori le caractère libre, éclairé, spécifique et exprès de ce consentement.
Encore, les conditions générales de vente attachées aux contrats de fourniture d’énergie n’apportent aux usagers aucune information sur leurs droits et ne garantissent pas le recueil d’un consentement libre, éclairé, spécifique et exprès des usagers pour le traitement, par les fournisseurs d’énergie et les sociétés tierces, de la courbe de charge générée par le compteur Linky.
Il va de soi que le déploiement d’un dispositif de collecte de données personnelles qui ne respecte pas les recommandations de la CNIL constitue une atteinte à la tranquillité publique qu’il appartient au Maire de prévenir, en vertu de ses pouvoirs de police.
Dans ce contexte, il est urgent de formuler auprès de la CNIL une demande de vérification de la régularité du déploiement du compteur Linky et de suspendre, par arrêté, le déploiement de ce compteur pendant le temps nécessaire à cette vérification.
En outre, il conviendrait que vous vous portiez garants du bon déroulement des opérations d’installation des compteurs, qui génèrent de fortes réticences parmi les habitants de la commune, peut notamment impliquer l’entrée dans le domicile des personnes, et ont déjà, dans de nombreux cas, été mises en œuvre par la force ou la ruse. Il serait ainsi particulièrement opportun qu’un règlement fixant la procédure à suivre par les entreprises en charge des installations soit élaboré par arrêté du Maire, lequel agirait alors au titre de ses pouvoirs d’exécution de la loi.
Nous souhaitons savoir si vous avez donné votre accord à ENEDIS pour changer les compteurs électriques de la commune :
- si oui, il n'est pas justifié que vous ayez pris une telle responsabilité sans consulter la population. Nous vous demandons de nous donner la copie de ces documents d'autorisation. Il est heureusement encore temps de revenir sur cette décision précipitée, nous vous demandons d'organiser dès que possible un débat public sur le sujet avec la population.
- si non, nous vous demandons de refuser par délibération municipale le remplacement des compteurs de la commune par des compteurs communicants, ou a minima d'organiser dès que possible un débat public sur le sujet avec la population.
Dans tous les cas, nous estimons que vous devez absolument exiger d’ENEDIS un certificat d'assurance concernant les risques causés par les ondes électromagnétiques.
Dans l'attente de votre réponse la plus rapide possible, nous vous prions de croire, Monsieur le Maire, Mesdames, Messieurs les Conseillers Municipaux, à notre attachement à notre santé et à la qualité de la vie dans notre commune et jusque dans nos habitations.
Françoise Mezzadri
Présidente de Triel Environnement